RACONTE TON HISTOIRE ⊹ « Le passé forge l'identité ». J'ai souvent entendu ça, j'ai souvent entendu que notre éducation nous définissait. J'aurais pu croire à ce que les personnes disaient, j'aurai pu faire attention à ma réputation, aux regards des autres sur moi, mais pourquoi ? Pourquoi prétendre quelque chose de faux ? A quoi ça servirait que les gens m'aiment ? Depuis tout petit je suis habitué à être soit détesté, soit mis de côté. Je suis né le 15 février 1993 , enfants de parents inconnus. Je ne suis même pas sûr de ma date de naissance. Je suis l'enfant sans identité, l'enfant mal aimé, l'enfant rejeté. Chaque heure, chaque jour, pendant six ans, je les passais à espérer. Espérer que la vie changerait, qu'elle m'offrirait un peu de bonheur dans ce monde sordide, ce monde sans joie, remplit de peine. Ce fut le 12 février 2001 que tout changea, que je compris enfin que la vie, c'était de la merde, qu'il fallait s'y accrocher de toutes ses forces, car, si jamais on lâchait, on était fichu. Oui, si jamais ça arrivait, on avait plus de but, ni de raison pour continuer le chemin. Je n'avais pas lâché, j'avais continué à m'accrocher. Malheureusement, la vie ne voulait plus de moi, alors, après toutes les embûches, tout les obstacles j'ai fini par abandonner, par me laisser aller et, les uns après les autres, mes doigts se décrochèrent.

12 février 2001

« Dis maman, je peux avoir ce jouet ?! ». Shbam, une claque dans la figure. « Je t'ai déjà dis de ne pas m'appeler maman en public ! » me répondit la dame à côté de moi, celle qui devait me servir de mère. Baissant la tête, je ne répondis rien. Je ne comprenais pas. Pourquoi quand les autres sortaient de l'école ils avaient leurs parents dehors ? Leur mère ou leur père qui les attendait avec un grand sourire tandis que moi, je devais rentrer à pied, tout seul, dans mon foyer qui était tout sauf chaleureux ?  Pourquoi lorsque je souriais à ma mère, elle me répondait « arrête avec cette tête de débile » ? Pourquoi est ce que j'avais l'impression d'être différent ? D'être le seul à ne pas recevoir d'amour ? Eh bien, ce soir là, j'eus toutes mes réponses. Ce soir là, on était à la maison. La femme froide qui m'hébergeait rangeait les courses, comme à son habitude. Ce soir là, j'avais envie de tout savoir, de ne plus être dans l'ombre. Alors, je m'approchais d'elle et lui demandait timidement : « Dis, pourquoi t'es pas comme les autres ? Pourquoi tu me prends pas dans tes bras, tu me fais pas de bisous ? Pourquoi j'ai pas droit de t'appeler maman ? ». Lentement, elle se releva, se retourna et me dit, en me regardant droit dans les yeux, sans aucune tristesse : « Car tu n'es pas mon fils ». Je compris vite au fil de la discussion que j'avais été adopté, que mes parents d'origine n'avaient pas voulu de moi. Quelques jours plus tard, une assistante sociale vint nous rendre visite. Apparemment quelqu'un avait vu Mme Franckfort me gifler au supermarché et avait tout de suite pensé à de la maltraitance. Ayant des doutes sur ma vie avec la dame, ils ont préférés me changer de famille, le jour de mon anniversaire.

18 mars 2014

Je continuais à lire, encore et encore mais en portant un nouveau regard. J'avais encore changé de famille, tellement de fois que je ne comptais plus. Une m'a viré à cause d'une claque, l'autre parce que je me bagarrais avec le fils, ensuite parce qu'on m'a surpris en train de fumer un joint, heureusement j'étais encore mineur et je n'ai donc  écopé de rien. Mais tout ces soucis s'envolaient dès que j'avais un livre entre les mains. Celui que j'étais en train de lire me faisait vibrer,  « Hell »,  ce livre est réaliste, voilà pourquoi je l'aime tant. Il explique que le bonheur est rare. D'ailleurs je l'ai vécu une fois, il n'y a pas si longtemps. J'ai réussi à le ressentir, même si c'était bref. J'ai réussi à croire pendant un moment. Mais la lumière s'est éteinte et mon monde est devenu noir. Tout est obscur maintenant. Je voudrais ressentir du positif à nouveau. Je voudrais pouvoir espérer pendant un moment, avoir une raison de penser que j'y aurais droit à nouveau car, vivre ce bonheur et le laisser partir c'est comme si l'on vous disait : « vous êtes au paradis mais n'avez pas droit d'y rester ». Alors profitez un maximum de ce petit bout de joie que la vie vous offre car, croyez moi, bientôt vous n'y aurez plus droit. Bientôt vous serez comme moi, vous aurez compris que rien ne sert de rêver. Vous réaliserez que l'espoir n'est qu'une illusion, un sentiment inventé pour que les gens continuent à croire en ce monde, pour que les personnes aient l'impression qu'il est beau, sans faille. Mais moi, je suis lucide. Je ne me suis pas caché les yeux, je ne me suis pas bouché les oreilles, j'ai tout vu, tout entendu. J'ai exploré la facette caché de cet univers.  Ce monde est égoïste. Il y a quelques exceptions, une personne, une femme qui m'a fait changé d'avis. Je l'ai rencontré, l'ai apprécié puis l'ai aimé. Mais toute histoire à une fin. Je sentais que je n'étais pas le garçon qu'il fallait pour elle, alors j'ai fui bêtement. J'ai pris mes distances. Cependant, toutes ses promesses que je t'ai faites, toutes ces choses que je t'ai dites, je ne les oublie pas, car, de toutes les paroles que j'ai prononcés, celles qui t'étaient adressées étaient les plus sincères. Malheureusement, j'avais besoin d'être seul, car, vois-tu en ta présence je perds la tête. Pourtant j'ai besoin de réfléchir, à toi, à nous. Je sais qu'on est pas fais pour être séparé, je sais que tu es mienne et que je suis à jamais à toi. C'est ça le plus idiot, c'est que notre amour est évident et que comme un con je le laisse passer. Je ne me comprend pas moi même. De quoi ais-je besoin ? Une seule réponse me vient à l'esprit : de toi. C'est pour ça que je te promets une chose de plus : On la vivra notre putain de belle histoire. Tandis que je notais ces quelques mots sur un papier, deux hommes s'approchèrent de moi : « T'a la marchandise ? ». Je relève la tête et lui répond : « T'a le fric ? ». Sans un mot de plus, il sort de sa poche une somme d'argent assez imposante. Je n'ai pas besoin de plus et lui fournit ce qu'il demande : de la cocaïne. Je ne sais pas ce que je vais faire de cette argent. Une partie de moi meurt d'envie d'aller m'acheter de la vodka et de tout boire. Non, je ne dois pas. Je ne peux pas retomber dans ces ténèbres là. Vous l'avez deviné, je suis un ancien alcoolique. La sensation de la gorge qui brûle quand on boit, le fait d'oublier, rien que pour un instant, qui on est.. Oui, il était dur de ne pas céder. Quoi qu'il en soit je ne devais pas. De toute manière cette argent devait me servir à payer le loyer de ce mois-ci. J'avais 21 ans maintenant, plus personne ne m'hébergeait. Je devais donc gagner de l'argent tout seul et pourquoi s'emmerder à travailler légalement si c'est pour gagner, au final, presque rien. Je me faisais quasiment plus en dealant. Je me fichais des arguments comme « Tu contribues à gâcher la vie de quelqu'un en faisant ça », je ne voyais pas pourquoi je me soucierais de la vie des autres alors que je n'accordais aucune importance à la mienne. Je ne voyais pas pourquoi je ne devais pas gâcher la vie des autres alors qu'eux ne s'étaient pas gêné pour détruire la mienne ! Finalement, je me plains sur ce monde mais j'y appartiens, j'aide à le détruire et étrangement, ça ne me dérange pas.